''L'amour c'est pas censé faire mal''. Quatrième partie - Le patern

Publié le par Pepper

''L'amour c'est pas censé faire mal''. Quatrième partie - Le patern

Le temps passe, et ton conjoint commence à augmenter sa consommation sans que ni toi ni lui ne vous en rendiez compte. Ça va tellement bien, il est tellement affectueux, que tu t'habitues à son haleine chargée, à le voir parfois vaciller quand il est debout et à ses yeux injectés de sang rendu à 21h le soir. Même le timbre de sa voix a changé. Tu t'habitues aussi à l'entendre parler avec une voix pâteuse. Si ça le rends de bonne humeur, pourquoi ça serait pas correct? Il se lève quand-même chaque matin pour aller travailler, beau temps, mauvais temps. Cependant, tu t'aperçois que tout cela te gêne quand vous visitez ta famille ou tes amis. Tu as l'impression que tout le monde que tu aimes regarde ton conjoint de travers parce qu'il n'est pas foutu de se présenter à ces réunions à jeun.

Les mois passent, et tu constates que si toi tu continues à aller travailler chaque matin, lui reste parfois couché et qu'il ''call'' malade. Votre relation commence à se détériorer peu à peu. Non-seulement sa consommation prend de plus en plus de place dans la vie de ton conjoint, il devient irritable et s'emporte pour des riens. Une journée, c'est à cause que le repas a été servi trop tard. Un autre jour, c'est parce que tu avais déplacé ses clefs en faisant l'époussetage et que tu as oublié de les remettre à leur place. Un autre, encore, parce qu'il s'est levé et qu'il n'y avait plus de lait pour son café. Et plus les colères se multiplient, plus elles deviennent violentes; coups de poing sur la table, coups de pieds et de poings dans les murs, vaisselle lancée, claquage de porte, hurlements... Quand il crie, il se met à deux pouces de ton visage et gesticule d'une manière menaçante. Tu ne sais plus comment agir, tu te remets tout le temps en question et tu développes des angoisses qui te serrent le coeur et l'estomac; ''est-ce que le lavage est fait, plié et rangé ou si j'ai oublié de le ranger?'', ''J'ai tu bien lavé la salle de bains?'' ou encore ''est-ce que c'était aujourd'hui que je devais sortir les vidanges?'' Tu ne sais plus jamais sur ''qui'' tu tomberas en revenant de travailler. Le conjoint content de te voir et tendre, ou le trou de cul à l'air bête? Tout cela te perturbe tellement que tu commences à avoir des difficultés à manger et que tu perds du poids. Un soir qu'il avait vraiment trop bu, il s'en est même prit à ton chat, l'a saisi puis jeté de toutes ses forces dans le mur... Il est méchant, te passe des commentaire désobligeants, refuse que tu invites qui que ce soit à la maison à cause des trous dans les murs un peu partout, mais refuse que tu ailles rendre visite à tes parents ou tes amis sous prétexte que vous ne vous voyez pas de la semaine, alors que dans le fond, c'est parce qu'il a peur que tu parles de ce qui se passe chez vous. Comme il n'a pas envie de se forcer à t'accompagner, ayant ainsi une manière de s'assurer que tu ne parleras pas, il s'arrange pour que tu n'y ailles pas toi non-plus. Tu évites ta famille comme la peste car tu sais pertinemment qu'ils verront dans tes yeux que tu vis l'enfer. Tes amis ont depuis longtemps baissé les bras. Tu es donc seule avec toi-même, tu absorbes à l'intérieur toute ta peine, ta peur, ta colère. Tu ne comprends pas comment votre relation a pu se rendre à ça; c'était un vrai conte de fée et maintenant, c'est un cauchemar. 

Les fois où tu as décidé de te tenir debout et de lui dire ses quatre vérités ou de faire valoir ton point de vue, cela a empiré la situation au lieu de la calmer. Plus les semaines passent, tu te dis que tu ne peux plus laisser cela perdurer, que tu dois te défendre et tu l'envoies paître de plus en plus souvent pour lui démontrer qu'il ne peut te piétiner impunément.  C'est invivable, mais tu gardes toujours un espoir que tout revienne à la normale et que ton conjoint réalisera à quel point il te traite mal et qu'il redeviendra tendre et doux comme au début de votre relation. Sachant qu'il avait déjà été abandonné par ceux qu'il aimait par le passé, tu te refuses malgré tout à le quitter; toi, tu ne l'abandonneras pas. Mais tu ne peux continuer à endurer sans jamais dire un mot.

Deux jours suivant un autre épisode violent qui laisse ton chat avec une patte et des côtes brisées, tu pettes ta coche solide. Ton conjoint a déjà ingurgité 8 bières et il est rendu 19h30. Montant le ton, tu lui dis que tu n'en peux plus de vivre ainsi, que son attitude est inacceptable et que tu n'accepteras plus de tels comportements de sa part. Ce qui devait arriver arriva; Ton conjoint s'est levé, s'est approché de toi en deux enjambées et t'a pris à la gorge. Il serre de plus en plus en te postillonnant au visage que tu es une petite ingrate avec tout ce qu'il a fait, tout ce qu'il a payé pour toi, de lui parler ainsi. Il t'agrippe soudain par les cheveux, délaissant ta gorge, et si tu peux maintenant respirer, une douleur cuisante irradie de ton cuir chevelu. Il te traîne jusqu'à la salle de bains, te secoue comme un prunier et finalement te pousse dans la baignoire, faisant heurter ta tête sur la céramique du mur. Tu t'affales dans le fond du bain, sonnée par le coup sur ta tête. Il se penche sur toi pour te demander si tu avais autre chose à dire. Terrorisée et ne voulant pas recevoir d'autre coups, tu fais signe que non. Il te donne une grosse poussée avec son poing dans ton visage en te répondant que c'est bien ça qu'il pensait, se relève et retourne au salon, à sa bière et à sa télé. Du salon, il te crie d'arrêter de niaiser et d'aller faire le souper parce qu'il n'avait pas envie de souper à 21h00. Tu te lèves, cinq minutes plus tard, étourdie et traumatisée, et c'est en retenant tes sanglots que tu vas faire le souper. Ce soir là, tu te couches sans lui souhaiter bonne nuit.

Le lendemain matin, tu te réveilles et tu as mal partout. Ta gorge te brûle, ta tête élance et quand tu te regardes dans le miroir de la salle de bain en sortant, tu as un choc. Tu ressentais bien une douleur à ton oeil gauche, mais ce que tu vois dans la glace te laisse sans mots: un énorme bleu, qui vire sur le noir, s'étend de ta tempe jusqu'à la commissure de tes lèvres. Tu ne peux pas aller travailler comme ça!!! Et comment tu vas faire pour aller à l'épicerie ou à la salle de lavage?! Les gens vont remarquer le bleu c'est sûr! En priant pour que tes parents ne choisissent pas de t'inviter à souper ou de passer te visiter pour les deux prochaines semaines, tu appelles à ton travail pour signifier que tu es malade et que tu ne pourras pas aller travailler pour le reste de la semaine. Après avoir monté des plans pour t'éviter de devoir sortir en public pour le reste de la semaine, tu retournes te coucher; après tout, pas besoin de rester debout, tu ne vas pas travailler. 

À son retour du travail, ton conjoint te rejoint dans la cuisine où tu es en train de faire la vaisselle et te prends dans ses bras par-derrière. Il te chuchote à l'oreille qu'il s'est ennuyé de toi pendant sa journée au travail. Tu demeures froide comme un concombre et tu refuse de lui accorder ton attention, continuant d'essuyer la vaisselle que tu viens de laver. Voyant cela, ton conjoint te prends par les épaules et te fait te retourner pour que tu le regardes en face. Il voit pour la première fois les marques sur ton visage et prends une expression sidérée. Tu peux voir toute une gamme d'émotions lui traverser le visage. Cela va du déni à la colère, de la honte à la tristesse. Cela se termine en repentir profond. Il a l'air tellement mal que tu le prends en pitié. Il te donne finalement le bouquet de fleurs qu'il t'a acheté avant de rentrer accompagné d'une carte contenant un poème d'amour qu'il a composé pour toi. Il n'arrête plus de s'excuser pour ce qu'il t'a fait subir la veille, te jure que c'est la première fois de sa vie qu'il perd ainsi le contrôle de lui-même. Il t'explique que c'est parce qu'il t'aime si fort qu'il n'y a que toi qui réussisses à le faire sortir de ses gonds comme ça. Qu'avant toi, il n'avait jamais aimé personne suffisamment pour se mettre dans un tel état. Il pleure à chaudes larmes en te disant à quel point il t'aime et que tu es la seule personne qui le comprends et l'aime comme il est. Il a l'air tellement sincère et tu souffres de le voir souffrir. Tu te mets à pleurer avec lui, le prends dans tes bras et vous allez vous asseoir sur le sofa pour mieux vous consoler. Il caresse la partie indemne de ton visage si doucement, si tendrement, que tu te sens fondre. Il suggère ensuite de t'emmener manger au resto pour le souper, mais prenant conscience des implications que comportent les marques sur ton visage, te dit qu'il va commander et que c'est lui qui ira ouvrir au livreur. Vous passez ensuite une soirée magique et douce, comme au temps du début de votre relation. Il te traite comme une princesse et te caresse aussi doucement que si tu étais une poupée de porcelaine. Tu lui racontes toutes les émotions que cette crise t'a fait vivre la veille, tu lui racontes ta peine et ton sentiment de solitude. Il t'écoute avec compassion, s'excuse encore et te promet que plus jamais il ne s'emporterait ainsi. Que sinon, il ne pourrait plus se regarder dans le miroir. Qu'il va s'abstenir de boire vu qu'il ne se contrôle pas bien quand il le fait. Tu le crois à 100%. Qui prendrait plaisir à traiter une autre personne aussi violemment? Tu connais bien cet homme, tu sais qu'il est bon et tu lui fais confiance. Les semaines suivantes sont merveilleuses, ton conjoint est aux petits oignons pour toi et il est redevenu doux comme un agneau et se montre intéressé par tout ce que tu as à lui raconter. L'énorme bleu sur ton visage a fini par tourner au jaune puis a disparu. Tout ira bien maintenant! Tu as retrouvé ta joie de vivre et ton appétit et tu visites ta famille plus souvent qu'avant. Tu as même renoué avec une ou deux de tes anciennes amies!

Le bonheur a duré 3 mois. Puis, un soir, tu es rentrée du travail et en ouvrant la porte de l'appart, tu as tout de suite reconnu l'odeur de fond de tonne, caractéristique incontournable des beuveries de ton conjoint. Un mélange de fermentation, de vomi et de bière. Ton coeur se serre et tu as l'impression que tu vas vomir. Tu te forces cependant à afficher un sourire et une bonne humeur que tu ne ressens pas; ce n'est pas parce qu'il a bu quelques bières que tout va redevenir comme c'était avant ''l'incident''. Tu ne veux pas induire la colère de ton conjoint en te montrant rébarbative ou rien de ce genre. La peur au ventre, tu le rejoins au salon et il t'accueille avec une vraie face de boeuf. Il te réponds à peine. Comme tu ne veux pas le pousser à petter sa coche, tu t'empresses d'aller préparer le souper. Quand tu l'avises que le souper est servi, il te réponds du salon qu'il n'a pas faim, et de lui apporter une bière froide à la place, ce que tu fais. Tu essaies ensuite de manger, mais rien ne veut rentrer. Tu ranges les restants dans le frigo et entreprends de faire la vaisselle. Vers 20hrs, tu as fait tout ce qu'il y avait à faire pour éviter que ton conjoint ne se fâche pour une raison ou une autre, et tu ne peux plus prétendre d'être occupée pour l'éviter. Tu vas donc le rejoindre dans le salon et tu t'assois sur le sofa à ses côtés en lui jetant un regard de biais pour essayer de jauger son état d'esprit. 

Rendez-vous demain pour la suite du patern.

- Pepper

 

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